Page 19 - Le Petit Fellagha par Med Kamel Yahiaoui
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Déjà, fallait-il leur expliquer ce qu'étaient des toilettes en
ville, qu'ils ne connaissaient guère.
Subtilement, un des enfants s'éloigna du groupe à une dizaine
de mètres, releva légèrement sa gandoura des deux côtés et
s'accroupit pour me montrer comment on s'y prenait pour
faire ses besoins à la campagne.
Ou quand j'avais transformé l'abreuvoir des animaux en
une piscine et avais vidé, en barbotant, son contenant d'eau,
une denrée rare que ces mêmes enfants avaient la corvée de
remplir les bassins en allant puiser cette eau à environ un
kilomètre de là, à pied et dans des bidons quelquefois plus
lourds qu’eux.
J'avoue que ce jour-là, ils l'avaient mauvaise et je n'avais
échappé à leur punition collective que parce que j'étais le
petit-fils de la respectable grand-mère, propriétaire de la
ferme.
Pourtant, grand-mère était réputée pour son équité et, si les
faits lui avaient été rapportés, elle ne m'aurait pas épargné la
correction comme, un an auparavant, j'avais reçu une bonne
raclée pour avoir arraché et éventré pas moins de vingt
pastèques parce qu'aucune n'était assez sucrée à mon goût.